Le TDA/H : prendre conscience des biais évaluatifs pour de meilleures pratiques cliniques - Première partie

1. Introduction

Les croyances sont soutenues par une panoplie d’idées véhiculées par notre société d’appartenance. Ces idées sont parfois bien évaluées avant d’être intégrées dans notre vision du monde. Leur crédibilité et leur validité sont alors mises à l’épreuve. Cependant, certaines croyances, sinon plusieurs, ne sont pas soumises à un examen aussi poussé qu’il le devrait. Cette considération m’a amenée à approfondir ma compréhension d’une problématique courante dans ma pratique : le Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Le TDAH amène son lot de questionnement dans notre société. La principale interrogation est souvent liée au surdiagnostic supposé du TDAH. Un débat est très actif sur ce plan. Je trouve donc important de vous faire part de ma réflexion sur le sujet. Dans la présente rubrique, je vise à répondre principalement à ces trois questions :

    1. Est-ce qu’il existe un réel problème diagnostic du TDAH ?

    2. Si oui, quels sont les biais à l’œuvre ?

    3. Comment améliorer la situation ?

Pour atteindre mes objectifs, je vais présenter dans un premier temps une définition du TDAH. La perspective du DSM-IV TR (2000) sera privilégiée pour cet aspect du travail. Ensuite, je tenterai d’amener certaines preuves soutenant l’idée qu’il existe un problème diagnostic réel avec le TDAH. Les biais possibles seront clarifiés en détails. Entre autres, les possibles confusions diagnostiques, les biais propres à l’acte d’évaluer et l’impact de certains facteurs socio-culturels seront abordés. Je vais discuter finalement de quelle manière il est possible de prendre en considération ces biais afin d’améliorer les pratiques évaluatives dans le cadre du TDAH.

2. Définition du TDAH

Selon le DSM-IV TR (APA, 2000), les personnes présentant un TDAH éprouvent des difficultés à se concentrer, à être attentives et à mener à terme des tâches demandant une certaine planification. Elles sont souvent fébriles. Elles ont de la difficulté à attendre leur tour et elles agissent d’une manière impulsive fréquemment. Il est nécessaire que les symptômes aient apparu avant l’âge de 7 ans et qu’ils durent depuis plus de 6 mois. Ils ne sont pas explicables par une autre maladie. Les comportements d’inattention et/ou d’hyperactivité peuvent se retrouver chez tous les êtres humains, mais ils sont présents de façon anormalement prononcée et prolongée chez ceux qui sont atteints d’un TDAH. Ils sont également présents dans toutes les circonstances de la vie (pas uniquement au travail ou uniquement à la maison, par exemple).

Plus précisément, il existe 3 sous-types de personne souffrant d’un trouble de l’attention selon le DSM-IV TR (2000). Le premier sous-type est celui avec prédominance d’inattention (TDA). L’approche catégorielle du DSM- IV TR propose neuf symptômes afin d’évaluer la présence ou non d’un trouble. Il est nécessaire d’atteindre un seuil minimum de 6 critères sur 9 afin de poser le diagnostic de TDA. Ces symptômes sont :

    1. Prête peu attention aux détails, fautes d’étourderie souvent présentes

    2. Difficultés à soutenir son attention

    3. Difficultés d’organisation ou de planification

    4. Évite les tâches demandant une attention soutenue

    5. Ne semble pas entendre ou écouter quand on lui parle

    6. Perds souvent des objets

    7. Facilement distrait

    8. Ne se conforme pas aux exigences demandées

    9. Fait des oublis fréquents

Le deuxième sous-type est celui avec prédominance d’hyperactivité-impulsivité. Il est aussi proposé neuf symptômes afin d’évaluer la présence ou non d’un trouble. Le seuil clinique est également de 6 critères sur 9. Les symptômes sont :

    1. Perception de bougeotte : bouge souvent les pieds ou les mains

    2. Court ou grimpe (sensation de bougeotte chez l’adulte)

    3. Souvent fébrile et surexcité

    4. Réponds trop vite aux questions

    5. Difficulté à se tenir au repos et tranquille

    6. Difficulté à attendre son tour calmement

    7. Se lève souvent quand devrait rester assis

    8. Parle trop, tendance à « placoter » lors de situations inappropriées

    9. Parle souvent avant que les autres aient fini de parler et impose sa présence

Le dernier sous-type est celui du TDAH combiné. Une personne ayant ce diagnostic répond à un minimum de 6 symptômes d’inattention sur 9 et à un minimum de 6 symptômes d’hyperactivité-impulsivité sur 9. Le type combiné serait la forme la plus courante de Trouble déficitaire de l’attention.

Trois symptômes sont donc centraux dans le TDAH : l’inattention, l’hyperactivité et l’impulsivité. Ils peuvent être présents à des degrés divers. Par exemple, un adulte toujours « dans la lune », mais peu agité, qui a de la difficulté à respecter les délais prescrits par ses patrons et qui ne retient pas les demandes de ses proches peut présenter un TDAH. Un autre individu surtout hyperactif, impulsif et agité tout en arrivant bien à se concentrer lorsque les tâches l’intéressent, peut aussi souffrir d’un TDAH.

Les critères proposés apparaissent très faciles à comprendre dans l’ensemble. La plupart sont clairement observables par des non-experts. Les symptômes sont concrets. Il devrait donc être facile de poser un diagnostic de TDAH. Nous verrons dans la prochaine section que la tâche n’est peut-être pas aussi aisée qu’il y paraît de prime abord.

Partie 2